Patrimoine

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Dès la préhistoire, Roquefort-les-Pins est habitée. Toutefois, ces habitats sont divers et les caractéristiques d’occupation, variables.
En majorité, il s’agit de plusieurs groupes humains peu nombreux et pour les plus anciens, nomades. Grâce aux fouilles archéologiques effectuées dans la grotte de la Péguière en 2010 et 2011, il a été possible de dater une première occupation aux environs de 14000 av. J.C. Des groupes capables de s’adapter aux changements de climat et aux ressources alimentaires présentes sur le territoire, vivaient probablement de la chasse et des produits végétaux. Conservant une vie indépendante, les grottes occupées sont nombreuses afin de répondre aux besoins de chaque groupe humain.
D’ailleurs, le site du dolmen des Peyraoutes est révélateur de ces différences d’habitat. Probablement élevé en pleine période néolithique (3500 à 1800 av. J.C.), le dolmen aurait été un tombeau : au moins 172 corps ont été dénombrés. Cette volonté de regrouper les morts dans un même lieu sépulcral dénote l’importance de la vie spirituelle pour les peuples du néolithique.
Parmi les ossements, le crâne trépané d’une jeune femme de 20 ans témoigne de la pratique d’une médecine chirurgicale à la Préhistoire, même s’il n’est pas aisé d’expliquer dans quelle mesure une telle opération était pratiquée.
Il est également possible d’affirmer l’existence d’une vie groupée au VIe siècle av. J.C., du moins, aux alentours de la Source du Noyer. Plusieurs objets remarquables ont été identifiés dès la fin du XIXe siècle : des cnémides (l’équivalent de protège-tibias) en bronze, un bracelet à boules, des pointes de flèches ainsi que des silex. C’est durant cette période que les historiens identifient les premiers rassemblements constants de population « celto-ligures ».

Les seigneurs et Princes d’Antibes fondent la première paroisse dont le lieu de culte est l’église Saint-Pierre (San Peyre).
Ils font également ériger un château fortifié sur un sommet rocheux, le Castellas, afin de conserver leur autorité sur le territoire. Selon l’explication de l’historien David Faure-Vincent, un édifice construit en hauteur est souvent qualifié de « roque ». Il est ainsi fort probable que le qualificatif de « roque » sur Loup puis, de « Roc fort » soit à l’origine du nom actuel de la commune, d’autant qu’il sous-entend une défense active du territoire.
Objet des rivalités entre les moines de l’abbaye de Lérins et la communauté de Saint-Paul, le territoire de Roquefort voit arriver son déclin dans la première moitié du XIVe siècle. En 1337 débute la Guerre de Cent Ans, opposant les Anglais et les Français. Les batailles se déroulent sur le territoire français, qui subit, en plus des dégâts militaires, les raids et les pillages des seigneurs. La tradition orale raconte qu’un moine et prieur de Roquefort, répondant au nom de Féraud de Cabris, aurait procédé à de nombreuses exactions et destructions dans toute la Provence. Quand le comte de Provence, le Roi Robert, réagit, il fit détruire en 1341 sa forteresse refuge, c’est-à-dire, le château de Roquefort.

Cet évènement, ainsi que l’épidémie de peste de ce siècle, marquent une baisse significative de l’activité humaine sur le territoire…

Au XIe siècle, la fondation de l’église Saint-Pierre, est significative. Elle suppose l’existence d’un nombre suffisant de croyants, et donc, de l’importance de la population, et témoigne également du succès de l’évangélisation des campagnes.
Secondées par l’église Saint-Michel située dans l’enceinte du château-fort et réservée à la cour seigneuriale, ces lieux de culte sont les deux centres de la vie rurale à l’époque médiévale.
Cependant, la désertification démographique du XIVe siècle provoque l’abandon de ces églises. Dans le cadastre de 1588, une chapelle est mentionnée, la chapelle Notre-Dame de Canlache, probablement construite sur les ruines d’un édifice païen. Son emplacement stratégique en fait un lieu fréquenté : elle a été construite, sur un plateau et non sur un relief escarpé donc facile d’accès, et au centre d’un carrefour de circulation dont les chemins distribuent Grasse, Saint-Paul et Antibes. Elle devient le nouveau centre de la vie villageoise de l’époque moderne au XIXe siècle.
Avec le développement démographique des siècles suivants, la localisation de cette église engendre des difficultés pour les habitants du Sud de Roquefort. Obligés de parcourir de 5 à 6 km pour se rendre à l’office, ils demandent vers 1850 la construction d’un deuxième lieu de culte aux environs du quartier du Colombier.
L’inauguration a lieu en 1884. Sur l’avis de l’abbé Féraud, superviseur de ce projet, cette nouvelle chapelle est dédiée au Sacré Coeur de Jésus et donne naissance à de nombreux pèlerinages. Grâce aux versements de dons, le successeur de l’abbé Féraud, l’abbé Suque, embellit la chapelle en créant un véritable sanctuaire, devenu progressivement le « Petit Montmartre ».
A la fin du XIVe siècle, le territoire de Roquefort est déclaré « inhabité ». Mais, en 1537, le roi de France, François Ier, lance des travaux de renforcement des remparts de Saint-Paul. Ces améliorations ont occasionné plusieurs expropriations afin d’obtenir un espace plus conséquent pour les fortifications. Pour dédommager les familles, la communauté de Saint-Paul leur attribue 400 parcelles de terres, situées sur le territoire de Roquefort. De la sorte, Saint-Paul conserve ses privilèges et les perceptions de ses droits sur les activités et le sol roquefortois.
Des bourgeois ainsi que des nobles possèdent des propriétés sur le territoire, souvent qualifiées de « bastides », mais n’y habitent pas de façon permanente. Il s’agit davantage de domaines d’exploitation agricole dans lesquels sont employés des fermiers, ou de résidences secondaires, le lieu de vie principal se situant à la Colle ou à Saint-Paul.
Cette nouvelle répartition en hameaux donne naissance à des microcosmes, qualifiés par la suite de « patèque », où les habitants profitent d’une grande autonomie. Par conséquent, les lieux de vie sont particulièrement dispersés sur l’ensemble du territoire roquefortois, à la fois de part et d’autre de la Miaine et également, dans le sud, formant ainsi une division entre le Haut et le Bas Roquefort.

Au début du XVIIIe siècle, une succession de crises a provoqué pour les habitants, comme pour les collectivités, une très forte et insupportable pression fiscale. La guerre de succession d’Espagne (1701-1713), l’invasion des Impériaux en 1707 en Provence, le grand hiver de 1709, la politique de rachat des droits féodo-seigneuriaux ont entraîné une explosion des impositions et des dettes communales. Les trois quarts des habitants vivent dans la misère. La paupérisation est générale.
Saint-Paul dont la trésorerie était aux abois, choisit la solution déjà utilisée au XIII°S par Lérins, de céder ses droits sur Roquefort.
15 novembre 1718 c’est le transfert de tous les droits féodaux avec haute, moyenne et basse justice de Saint-Paul, aux familles Alziary, Bellissime, Lombard et Mougins (celle-ci anoblie le 2 avril 1822) : la coseigneurie de Roquefort est née de la crise fiscale de Saint-Paul.

En décembre 1789, J-J Mougins de Roquefort, maire de Grasse, député du Tiers-Etat aux Etats-Généraux, obtint de l’Assemblée Constituante, l’érection de la paroisse de Roquefort en commune distincte de Saint-Paul, séparation opérée en février 1790.
Nouvellement indépendante de Saint-Paul et des quatre coseigneurs, Roquefort jouit d’une organisation administrative inédite : dorénavant, un maire nommé par le préfet, représente l’autorité de référence, et le premier à obtenir cette fonction a été Honoré Civatte, originaire du quartier du Boisnègre. Il entretient une correspondance régulière avec le préfet et le sous-préfet, attestée aujourd’hui par une grande quantité de ces courriers conservés dans le fonds des archives communales.
Source : Texte de Georges Deloste

Le XIXe et le début du XXe siècles représente une période essentielle dans l’histoire de la commune car il voit le lancement d’importants travaux communaux.
En 1861, sont dressés les premiers devis relatifs à la construction d’une maison commune en face de l’église Notre-Dame de Canlache. Ce projet ne suscite pas une décision unanime de la municipalité en raison des problématiques d’accessibilité : les habitants du Sud restent éloignés de 5 à 6 km de la maison commune. Ainsi, plusieurs courriers mentionnent la démission de membres du conseil municipal, qui revendiquent, par ce moyen, leur opposition. Toutefois, la nouvelle mairie est érigée à l’emplacement choisi, et les premiers travaux de restauration sont même envisagés en 1886.
Durant cette période, la municipalité prend à coeur d’améliorer le confort des habitants. Les premiers travaux d’adduction d’eau sont entrepris, et projettent de distribuer les eaux du canal du Foulon. Pour se faire, Roquefort doit traiter avec les communes qui bénéficient également de ces eaux, notamment le Rouret et Grasse. Même si l’eau potable arrive en 1899, les accords sont fastidieux à établir et les litiges concernant les concessions d’eau se poursuivent jusqu’en 1940 (du moins, dans les documents des archives communales). Aujourd’hui encore, la maitrise de l’eau représente des enjeux importants pour Roquefort-les-Pins. 

De plus, l’entretien des chemins ruraux devient une priorité pour la commune, qui prend progressivement conscience de la richesse de ces chemins. Aujourd’hui, Roquefort-les-Pins dispose de 53 kilomètres de chemins et développe une politique de mise en valeur des sentiers, conjointe avec un développement des pistes cyclables.
Enfin, les besoins de subsistances et d’optimisation du service public supposent le désenclavement de la commune et le développement des voies de communication vers les grandes villes alentours.
La route 2085 (initialement route des Claps), reliant Cagnes à Grasse, est celle qui a demandé le plus d’investissements matériels et financiers. En effet, elle est construite entre 1910 et 1916, avec, en parallèle, la construction de la voie du tramway, inauguré en 1911. Cette ligne permettait ainsi d’ouvrir l’accès à Roquefort et de desservir des zones restées longtemps isolées.
Cependant, plusieurs accidents ont décrédibilisé la fiabilité de ce moyen de transport. L’accident du 17 septembre 1913 au Pont des Vignes a entrainé 19 morts et 39 blessés. Par la suite, plusieurs déraillements ou lâchages de freins ont effrayé les usagers et la ligne cesse de fonctionner en 1929.
Dès la période préhistorique, les zones de peuplement sont dispersées sur l’ensemble du territoire roquefortois. Les premiers regroupements continus datent probablement de l’Age du Fer, c’est-à-dire entre -1000 et -300, et se stabilisent finalement à la période médiévale. Les foyers de peuplement se trouvent alors autour de l’église Saint-Pierre et de l’église Saint-Michel, jusqu’à la baisse démographique des XIVe et XVe siècles.

Cependant, au XVIe siècle, suite aux travaux de fortification de Saint-Paul, une deuxième vague de population s’implante sur le territoire de Roquefort. De même qu’à la période préhistorique, ces nouveaux habitants ne forment pas une communauté cohérente, comme l’on peut le constater dans d’autres villages de la même époque, mais s’installent en fonction des terres qui leur ont été attribué. Ainsi se créent des hameaux qui sont juridiquement, économiquement et politiquement dépendants de Saint-Paul jusqu’en 1790.
Depuis la prise d’indépendance de la commune au lendemain de la Révolution française, la gestion du territoire revient au Maire et à ses conseillers. C’est la première fois depuis le repeuplement du XVIe siècle que l’autorité politique réside sur la circonscription qu’elle a en charge. Malgré tout, il faut patienter jusqu’à la seconde moitié du XIXe siècle pour matérialiser ce nouveau statut : le projet de construction d’une maison commune n’est lancé qu’en 1861 et n’obtient pas une approbation unanime. En effet, il est prévu de construire ce bâtiment à proximité de l’église Notre-Dame de Canlache. Les problématiques de distance réapparaissent pour les Roquefortois vivant au Sud de la commune.
La population reste divisée. D’ailleurs, le lieu de rassemblement du conseil municipal est transféré quatre fois, jusqu’à la fixation définitive du lieu, en 1989, dans la mairie actuelle. De même, les lieux d’enseignement scolaires ont généralement suivi les déplacements des mairies.

Toutefois, avant que la mairie devienne le centre de la vie communale à la fin du XXe siècle, ce rôle était endossé par les églises. Tout d’abord concentrée, à l’époque médiévale, autour des églises Saint-Michel et Saint-Pierre, la population s’est ensuite rassemblée autour de l’église Notre-Dame de Canlache. Avec le temps, l’éloignement géographique entre le Nord et le Sud est devenu trop important et un deuxième centre s’est créé autour du sanctuaire du Sacré Coeur. A l’image de la vie médiévale, la vie moderne aux XIXe et XXe siècles se déroulait sur deux points opposés du territoire.
Il faudra attendre la fin du XXe siècle et le début du XXIe siècle pour que les pouvoirs publics se concentrent en un seul lieu, le quartier du Plan, créant ainsi une zone de convergence et de réunification identitaire à Roquefort-les-Pins.